
« Ah ! si tu déchirais les cieux, si tu descendais ! ». Ce cri du prophète Isaïe, chacun et chacune de nous l’a peut-être poussé à sa façon en cette période difficile que nous traversons ! Déchirer les cieux, descendre du ciel pour nous sauver ! Ce désir de l’homme se fait plus pressant que jamais. Nos sociétés sont traversées par des peurs, des angoisses, qui peuvent conduire au découragement, à la désespérance. Alors beaucoup attendent un salut qui viendra d’ailleurs, un salut qui aujourd’hui concerne peut-être avant tout la santé : être sauvés de ce virus. Mais pour d’autres ce sera la fin d’une guerre ou de la violence, l’établissement de la justice… Et qui viendra apporter ce salut ? un vaccin, un homme providentiel ou une personne qui rassure ? L’attente d’un salut n’est pas si lointaine des préoccupations des hommes et des femmes d’aujourd’hui.
Et l’Evangile que nous venons d’entendre nous invite à veiller. Veiller pour attendre quoi ? Que signifie donc ce temps de l’Avent, quel salut attendons-nous ? Dans l’Exhortation apostolique ‘Christus vivit’ qui fait suite au Synode sur les jeunes, le Pape François écrit : « Le salut que Dieu nous offre est une invitation à faire partie d’une histoire d’amour qui se tisse avec nos histoires ; […] pour que nous puissions donner du fruit là où nous sommes, comme nous sommes et avec qui nous sommes. C’est là que le Seigneur vient planter et se planter » (n. 252). Le salut que nous attendons, c’est bien Dieu lui-même qui déchire les cieux, et qui descend. C’est Dieu qui, en nous donnant son Fils, Jésus, vient vivre avec nous une histoire d’amour, une histoire de vie. C’est Dieu qui exprime sa profonde compassion au cœur de notre monde qui souffre. N’ayons pas peur de l’appeler à notre aide : Déchire les cieux et descends !
Oui, le salut que nous attendons, c’est Jésus qui vient mêler sa vie à la nôtre, et plonger ses racines dans la terre de chacun et de chacune de nous. Et il nous donne le secret de cette vie : on ne la possède qu’en la donnant. Car en faisant pleinement le don de sa vie à son Père, Jésus l’a offerte pour que tous les hommes puissent vivre pleinement. Et c’est bien l’aspiration de l’homme qu’il rejoint là ! Vivre ! Le salut que nous attendons n’est pas ‘suspendu dans les nuages’ attendant d’être déversé sur nous dans un autre monde. Il se déploie dans nos vies, lorsque nous existons pour le Christ et pour les autres. Le salut, c’est notre histoire et l’histoire de Dieu avec nous. C’est une histoire de vie !
Une histoire qui commence dans nos existences terrestres, pour s’épanouir dans ce que nous appelons la vie éternelle, qui sera alors la pleine réalisation du mystère de l’Incarnation que nous célèbrerons à Noël.
Et si le temps de l’Avent est le temps de l’attente, il est aussi un temps qui manifeste la proximité de Dieu. Celui que nous attendons, c’est un Dieu qui s’est fait proche de nous ! Il a déchiré les cieux et il est venu, dans la personne de Jésus, il y a 2000 ans. Il a déchiré les cieux et il vient aujourd’hui de bien des manières, à travers les sacrements bien sûr, à commencer par l’Eucharistie, à travers les Écritures. Mais il vient aussi à travers tant de rencontres personnelles ou communautaires ; ce que nous pouvons appeler le sacrement de la rencontre, le sacrement du frère ! Dieu qui se fait proche en portant sur nous son regard de miséricorde, qui nous voit dans notre être le plus secret et qui nous aime. Alors, au cours de ce temps de l’Avent, prenons le temps nous aussi de nous arrêter pour contempler le visage de Celui qui vient se faire si proche de nous. Contemplons-le à travers les Écritures, mais aussi à travers le visage de nos frères et de nos sœurs, de notre monde. A travers eux, visages souffrants, visages en ruine parfois, mais aussi visages heureux et fraternels, cherchons le visage de Jésus qui aime chacun et chacune et veut les attirer à lui. Un visage de paix, de miséricorde.
Sur tous ces visages, nous pouvons contempler le visage de Jésus, car, en entrant dans l’histoire de notre humanité, il a fait que nous sommes tous concernés par cette histoire d’amour que Dieu est venu vivre avec nous. Cette ‘histoire d’amour’, c’est l’histoire de vie de toute la famille humaine, en vue de former le Corps du Christ. Et si par le don de sa vie, le Christ est la manifestation plénière du salut, les chrétiens ne sont pas les seuls à en bénéficier, ni à en témoigner. Tant d’hommes et de femmes de bonne volonté font le don de leur vie, en se mettant au service de leurs frères. Par là ils apportent aussi la preuve que Dieu s’est fait proche d’eux et qu’ils veulent en vivre, à leur manière. Eux aussi font partie de cette ‘histoire d’amour’ qui n’exclut personne. « Nous sommes tous l’ouvrage de ta main » nous a dit Isaîe dans la première lecture.
Dans la deuxième lecture saint Paul faisait allusion au témoignage rendu au Christ par les premiers disciples de Jésus. « Le témoignage rendu au Christ s’est établi fermement parmi vous ». Nous aussi, nous sommes appelés à porter ce même témoignage, à être pour les hommes et les femmes d’aujourd’hui, des signes de la proximité de Dieu. Alors frères et sœurs, ne perdons pas de temps ! Restons éveillés, il ne faudrait pas que le Maître nous trouve endormis ! Viens Seigneur Jésus ! Réveille-nous ! Amen.
J. L.
