Homélie prononcée par son Éminence le cardinal Leonardo Sandri, Préfet de la Congrégation pour les Églises Orientales, le Dimanche 17 octobre 2021 en l’église Saint-Louis-des-Français de Rome

Messe de la solennité de S. Louis, roi et co-patron de la France

Très chers frères et sœurs !

Le pape Grégoire IX écrivait au jeune roi Louis que « Dieu choisit la France » ; que « Dieu aime la France. » Quelle joie de pouvoir nous rassembler ce dimanche dans cette église où les enfants de France se réunissent depuis tant de siècles pour louer Dieu, intercéder pour leur pays et prier pour la mission de l’Eglise.

Aujourd’hui nous célébrons votre saint Patron. Nous lui demandons d’intercéder particulièrement pour vous, pour les dirigeants de votre pays qui sont représentés par ces ambassadeurs près l’Italie et le Saint-Siège, et pour toute la nation française.

Mais ce saint n’est pas seulement le vôtre. C’est aussi un modèle pour tout le peuple de Dieu, un modèle de vie chrétienne au service du Christ et du prochain.

La vie de saint Louis, son amour de Dieu et de l’Eglise, de la justice et des plus pauvres est un enseignement pour chacun, quel que soit notre état de vie ou notre vocation. La vie de saint Louis, jusqu’à ses derniers enseignements dans son testament, nous aide à incarner la parole du Seigneur entendue dans l’Evangile : le plus grand des commandements qui résume toute l’Ecriture c’est l’amour de charité.

Ces lectures peuvent nous étonner. Nous célébrons un roi puissant, l’un des premiers de son temps. Mais notre Dieu ne magnifie pas ce type de grandeur ou de pouvoir. Dieu nous révèle en Jésus-Christ un tout autre idéal : celui du service, de la pauvreté de cœur et de l’humilité vécus dans le don de soi. C’est ce chemin qu’à emprunté Louis à la suite du Christ, lui permettant ainsi de passer d’un royaume terrestre au Royaume de Dieu. Sur la montagne, le Seigneur Jésus nous l’a enseigné : « Heureux les pauvres de cœur, car le royaume des Cieux est à eux. » Louis IX incarnera cette béatitude de manière extraordinaire et nous appelle à faire de même.

Dès sa plus tendre enfance, sa mère, Blanche de Castille, lui enseignera la foi, la prière et l’amour de l’Eglise. Parce que l’amour de charité doit être premier dans la vie d’un chrétien, elle lui apprendra aussi l’horreur du mal et du péché qui blessent notre relation à Dieu et aux autres. Elle lui disait qu’elle aurait préféré le voir mort plutôt qu’en état de péché mortel. Des mots bien durs dans la bouche d’une mère ! Mais tout ce qui s’oppose à l’amour et à la vie que le Seigneur nous offrent, ne devrions-nous pas les rejeter de toutes nos forces ?

Le Christ nous donne un commandement qui doit transformer nos vies dans tous ses aspects : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur ~ Tu aimeras ton prochain comme toi-même. » Et : « Aimez-vous les uns les autres, comme je vous ai aimés. »

Ce chemin de l’amour véritable est exigeant. Jésus, le premier, l’a emprunté. Et il implique des choix courageux, loin des compromis qui peuvent devenir de graves compromissions. Car seul le don total mène à la sainteté, à une vie libre et vraie, libérée de tout mal et de toute attache mondaine. Saint Paul n’hésitait pas à dire que nous devions faire de nos vies un sacrifice saint. Voilà le secret de la joie parfaite : une vie donnée. Le saint roi écrira dans son testament spirituel : « Beau fils, la première chose que je t’enseigne, c’est que tu mettes ton cœur à aimer Dieu, car sans cela nul ne peut être sauvé. » Du haut du Ciel, il le redit solennellement à chacun d’entre nous.

Notre saint Patron nous apprend à choisir Dieu seul dans l’Eglise qu’Il a instituée. Il a vécu ce commandement de l’amour d’une manière héroïque parce qu’il puisait à la source du Cœur de Jésus. C’était un homme de prière qui méditait l’Evangile. Il vivait intensément de la divine Eucharistie et se laissait renouveler dans le sacrement de Pénitence. Faisons de même. Il a été un homme d’une profonde vie intérieure, un roi qui n’a pas eu peur de se mettre publiquement à genoux devant son Sauveur, comme un mendiant trop conscient de ses faiblesses et sachant bien qui donne la force véritable. C’est là qu’il trouvait la force pour servir son peuple.

Imitant la vie des premiers franciscains, il n’aimait rien de moins que la simplicité et la pauvreté. Comme Jésus au soir du Jeudi Saint, il lavait lui-même les pieds des pauvres et les servait à table. Il ne le faisait pas pour se faire bien voir et se donner en spectacle, mais « en acte et en vérité. » Il incarnera cette grâce de l’oubli de soi, se sachant pauvre, comme tout un chacun, malgré son titre et sa naissance. Comme l’écrit Bernanos, il savait que « la grâce des grâces serait de s’aimer humblement soi-même, comme n’importe lequel des membres souffrants de Jésus-Christ ».

S’il a bâti la Sainte-Chapelle, cette merveille de pierre et de verre, c’est pour accueillir les précieuses reliques de la Passion dont la plus insigne est la Couronne d’épines. Cette relique de la Passion était pour lui le mémorial de l’humilité et de la charité du Christ qui nous invite à fuir le mal et choisir toujours le bien. Elle lui rappelait sans cesse son devoir de service et d’amour. Car à travers les souffrances et les larmes des tout-petits nous entendons l’appel du Seigneur à Le servir concrètement : « J’avais faim ; j’avais soif ; j’étais un étranger ; nu ; malade ; vous êtes venus jusqu’à moi ! Chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait. »

Frères et sœurs bien-aimés, aimez à prier un tel saint pour qu’il vous soutienne dans votre suite du Christ. Plus que jamais, le monde a besoin de ce témoignage concret de la charité chrétienne. Particulièrement, sa miséricorde infinie pour les plus pauvres et les pécheurs.

Avec saint Louis, et spécialement en ce mois du Rosaire, priez la Vierge Marie qui a tant honoré votre pays. Dans le ciel étoilé de Pontmain, Notre Dame disait : « Mais priez mes enfants ! Dieu vous exaucera en peu de temps. Mon Fils se laisse toucher. »

Accueillons ces appels pressants du Ciel à prier avec ferveur, à écouter Dieu, à la pénitence et au pardon mutuel en vivant des œuvres de miséricorde. Le Pape aime à parler de « la caresse de Dieu qui nous permet de rêver le monde plus humain et, par conséquent, plus divin ».

Et bien, au moment de professer notre foi et de restaurer nos forces à la table du Seigneur, demandons à la Mère de Dieu et à saint Louis de prier aujourd’hui pour nous et pour la France. Comme pour ce saint roi, que nos paroles ne soient pas vaines mais bien un engagement à servir toujours plus fidèlement.

Amen.

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